Est-ce parce qu’elle a frôlé la mort à l’âge de huit ans, atteinte d’une encéphalite, que l’entreprise autobiographique de Maggie O’Farrell est construite autour de dix-sept rencontres avec la mort, comme l’indique son sous-titre ? I am, I am, I am est en effet composé de dix-sept chapitres - presque des nouvelles. Chacun est précédé d’une date et de la mention d’une (ou de plusieurs) partie du corps - accompagnée d’un croquis anatomique, celle par laquelle la mort aurait pu arriver. Ces fragments de vie ne suivent pas l’ordre chronologique conventionnel ; Maggie O’Farrell propose au lecteur un cheminement dans lequel la mort semble se rapprocher de plus en plus, l’avant-dernier chapitre étant consacré à son encéphalite. Rares sont les autobiographies qui maintiennent le lecteur dans un état de tension permanent, et qui va même croissant jusqu’à la dernière ligne. Une construction digne des meilleurs thrillers, une véritable course contre la mort.
Dans cette autobiographie surprenante et éprouvante, Maggie O’Farrell nous rappelle que le corps est le cœur de nos vies, d’autant plus quand on est une femme (et on pense au très beau film de Claire Simon, Notre corps). L’encéphalite, dont elle garde des séquelles, a profondément modifié son rapport à la mort et à la vie : « Avoir frôlé la mort de si près, enfant, et être revenue à la vie, m’a insufflé une forme d’inconscience, d’irresponsabilité, voire de folie face au danger ». La naissance de ses enfants l’a changé de nouveau, en particulier car la santé fragile de sa fille la fait vivre « dans un état d’alerte permanent ». Dans le dernier chapitre « Ma fille / Aujourd’hui », le plus poignant, l’autrice tisse un lien entre son histoire et celle de son enfant, celui de la survie.
I am, I am, I am, Maggie O’Farrell, traduit par Sarah Tardy, éditions 10/18, 2020, 288 pages.
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