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Inventaire du matrimoine, Coralie Grimand

  • HBN
  • 18 avr.
  • 2 min de lecture

Une femme de cinquante ans se voit confrontée brutalement à la vieillesse de ses deux parents et surtout à la maladie dégénérative de sa mère. Alors, malgré elle, surgit dans sa tête, dans son cœur, un inventaire familial. 

 

Anne, la narratrice, retisse le lien conjugal sans indulgence, sans mièvrerie, dans cette maison créée avec amour et détermination par Edwige. Une grande admiration pointe à chaque étape de la vie de sa mère. Tout commence dans les Ardennes durant la seconde guerre mondiale : elle revit l'exode de la famille, imagine la jeunesse de sa mère, benjamine d'une famille agitée et nerveuse (voire psychologiquement fragile), elle en ressent les drames et les deuils et surtout elle décortique, dissèque la relation amoureuse entre ses parents : « Son être, tel un corps noir, absorbait toute la lumière reçue d'elle sans la restituer. Depuis leur rencontre, le banquet de noces, elle avait colonisé ses pensées, elle remplissait tout l'espace. Il l'admirait. Il aimait sa façon de prendre possession de chaque pièce, d'envahir l'intérieur, l'extérieur, de régner sur sa famille, de briller en société, d'être à la fois indispensable à chacun tout en conservant toujours une distance de sécurité, ses secrets. Il n'en revenait toujours pas qu'elle l'ait choisi. »

 

Tour à tour les voix du père, de la mère, de l'aide à domicile donnent un son différent au fameux   « inventaire ».  La culpabilité et la rancœur sont omniprésentes, véritables jalons de la tendresse filiale. Et puis il y a le jardin, les herbes folles, le compost et un mystérieux représentant en isolation. Dans ce roman, la temporalité est étrange, le temps est arrêté ou s'écoule si doucement quand la vie s'enfuit de la maison. Au fil de la lecture le plaisir des mots s'installe comme une approche singulière des sentiments tus ou mal exprimés : « Je panosse, je brique, je traque le camoussé, lui répondait-elle sur le ton de la plaisanterie… Edwige souriait en entendant ce langage ancien, comme à un calembour, un souvenir agréable. Anne avait hérité côté maternel du goût des livres et des mots insolites qui germent comme des graines dans la conversation... »

 

C’est un beau roman, ce n’est pas une belle histoire, c'est la vie tout simplement  qui s’approche dangereusement de la fin. Coralie Grimand nous entraîne sur son chemin réaliste, cynique quelquefois, mais non dénué de tendresse.

 

Inventaire du matrimoine, Coralie Grimand, Arlea, 1er/mille, 2024,  245 pages.

 
 
 

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